servantsDepuis longtemps les catholiques français se disputent sur les questions liturgiques. D’un côté c’est le signe que nous attachons de l’importance à la liturgie et spécialement à l’eucharistie, « sommet et source de toute la vie de l’Église » (Vatican II, SC n° 10). D’un autre côté c’est un piège redoutable, pour ne pas dire diabolique. Il ne faut pas que la messe, lieu par excellence de la communion, devienne le lieu de la division.

J’aime rappeler le sage principe attribué à saint Augustin et repris par Jean XXIII :  In necessariis unitas, in dubiis libertas, in omnibus caritas (dans les choses nécessaires l’unité, dans les choses douteuses la liberté, en toutes choses la charité). Demandons en plus la vertu royale de l’humilité, qui permet de vivre nos désaccords avec paix et patience. Sans se raidir dans ses positions, compter ses alliés et ses adversaires et, au pire, menacer de démissionner. Le paradoxe, c’est qu’on peut être intraitable et absolu sur des options relatives et discutables, et en même temps très laxiste sur des points essentiels et indiscutables de la foi de l’Église.

Permettez-moi de revenir par exemple à la question très discutée dans notre secteur de la place des filles dans le service de l’autel. En résumé : Les uns mettent en avant l’égalité homme/femme et considèrent que la séparation des rôles est discriminante ; ils peuvent s’appuyer sur un avis de Rome, disant que si la femme peut exercer le service de lecteur, elle peut exercer celui d’acolyte ; d’ailleurs le Pape a ouvert aux femmes les ministères « institués » (c’est-à-dire stables et officiels), y compris récemment celui de catéchiste. Les autres soulignent que « peut » n’est pas « doit ». Ils mettent en avant la complémentarité homme/femme et souhaitent honorer le charisme féminin ; ils peuvent s’appuyer aussi sur un avis de Rome : celui qui célèbre l’eucharistie tient la place du Christ, c’est un homme, il convient que ceux qui l’entourent dans le sanctuaire soient également de sexe masculin ; en outre ce service de l’autel peut susciter des vocations (Dicastère des sacrements et de la liturgie). Enfin, l’expérience montre que les filles étant plus mûres que les garçons, elles finissent parfois par occuper tout le terrain.

C’est un bon exemple de ces situations concrètes où la facilité serait d’imposer une règle (la mienne !) au lieu de faire ensemble un discernement. Ce qui suppose une écoute mutuelle, une bienveillance pour entendre et si possible honorer la part de vérité qu’il peut y avoir chez chacun. À la fin il faudra bien prendre une décision, qui ne plaira peut-être pas à tout le monde ; mais le fair play permettra qu’il n’y ait ni des vaincus ni des vainqueurs, mais des frères.