lumiere tenebres

Les derniers dimanches de l’année chrétienne, mais aussi le premier dimanche de l’Avent, la liturgie ne craint pas de nous parler de la fin du monde. Ainsi, du commencement à la fin, l’Église en prière est mise dans la perspective de l’éternité.

C’est une question essentielle, à la fois universelle et intime (car mourir est déjà une fin du monde) : qu’est-ce qu’il y a, après ? En français le mot « fin » est à double sens : il dit à la fois la finitude et la finalité. Autrement dit la question de la fin du monde est aussi la question du sens de l’histoire – y compris de mon histoire personnelle, ces quelques dizaines d’années, écume des jours dans le flot des millénaires.

La réponse tient en quelques mots, à peine une phrase, la dernière ligne de notre profession de foi : J’attends la vie du monde à venir (Credo de Nicée-Constantinople), Je crois à la vie éternelle (Symbole des Apôtres). L’Au-delà : cette expression est devenue étrange, et même étrangère, dans une société de l’ici-bas, qui ne sait pas ou qui ne veut pas savoir que l’homme passe infiniment l’homme. Du coup la mort devient impensable et indépassable. L’affolement sanitaire est pour une part le résultat de ce non-dit. Mais on peut se demander si les chrétiens eux-mêmes n’ont pas réduit leur horizon au monde terrestre. Certes la charité nous prescrit d’aimer ici et maintenant, et la foi éclaire la vie présente. Mais l’espérance, mémoire de l’avenir, parent pauvre, a peu de place dans nos catéchèses et nos homélies. Souvent on la réduit à l’espoir (le rêve) d’un monde meilleur, alors qu’elle est la promesse d’un monde nouveau, où il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, mais la pure lumière de l’Agneau (Ap 21, 4 & 23). Saint Paul : Si nous avons mis notre espoir dans le Christ pour cette vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes (1Co 15, 19). Car nous perdons sur les deux tableaux ! 

Avent s’écrit comme aventure. Quatre semaines pour réveiller le désir et le goût de l’à venir. Nous sommes pèlerins non pas du futur mais de l’éternel. La vie présente est un chemin qui mène au terme de notre espérance (Saint Grégoire de Nysse). À la messe, après le Notre Père, le célébrant poursuit : Délivre-nous de tout mal… en cette vie où nous espérons le bonheur que tu promets et l’avènement de Jésus Christ notre Sauveur. Bel exemple d’horizontalisme ! La nouvelle traduction du Missel (qui était attendue pour le premier dimanche de l’Avent, mais qui est encore retardée d’une année) dira plus justement : nous qui attendons que se réalise cette bienheureuse espérance : l’avènement de Jésus Christ, notre Sauveur. À nous la gloire du Ressuscité et la joie divine de la Sainte Trinité ! Espérer moins serait ignorer le cœur de Dieu et rétrécir le cœur de l’homme. 

Famille Chrétienne, 28 novembre  2020